Pour régler le problème de la pollution spatiale, des chercheurs ont imaginé des “stations lasers spatiales” placées en orbite terrestre.
La pollution n’est pas seulement un problème sur Terre. Dans l’espace, et plus particulièrement en orbite terrestre, des centaines de milliers de débris de fusées, des bout de satellites hors d’usage et autres déchets spatiaux dérivent dangereusement. Ils menacent les satellites encore fonctionnels, voire la Station spatiale internationale (ISS).
Afin d’éviter de potentiels désastres, des chercheurs planchent depuis des années sur diverses solutions pour dépolluer l’espace. Des scientifiques de l’Université chinoise Air Force Engineeringaffirment qu’il est possible de pulvériser une partie des déchets orbitaux grâce à des stations spatiales équipées de laser. Leur projet est présenté dans une étude publié par la revue Optik.
“Les petits débris sont les plus dangereux”
“Les petits débris [entre 1 et 10 cm] sont considérés comme les plus dangereux, soulignent les scientifiques chinois. Ils ne peuvent pas être surveillés ou suivis et, à cause de leur importante énergie cinétique, [ils] constituent un danger sérieux pour les vaisseaux spatiaux qui ne peuvent pas se blinder suffisamment pour s’en protéger”. La solution la plus prometteuse, selon eux, consiste en de puissants lasers, capables de faire dévier les déchets de leur trajectoire, en les poussant vers l’atmosphère terrestre pour qu’ils y brûlent ou en les repoussant plus loin, vers une “orbite cimetière”.
Après avoir simulé plusieurs modèles sur ordinateur, les chercheurs ont déterminé que des stations dotées de lasers pulsés -produisant de courtes impulsions denses en énergie- pourraient dévier les débris spatiaux de moins de 10 centimètres, en procédant à un “bombardement” de plusieurs milliers de rafales lumineuses en quelques minutes. L’opération fonctionnerait même dans “un rayon de 200 km”, sous certaines conditions, précisent-ils, comme “l’angle d’attaque”, “l’inclinaison de la station” ou encore la “vélocité” des objets à intercepter. Évidemment, il ne s’agit que de calculs et de simulations informatiques, mais les chercheurs l’assurent, leurs travaux “fournissent la base théorique nécessaire au déploiement de [véritables] stations lasers spatiales”.
Les initiatives se multiplient face à un problème grandissant
D’autres scientifiques se sont déjà penchés sur le meilleur moyen de nettoyer l’espace. Des Japonais avaient notamment prévu d’envoyer, en février 2017, un satellite capable de récupérer des débris grâce à un filet -mais le lancement s’est soldé par un échec. Un ingénieur français a lui imaginé “un chasseur spatial”, expulsant les débris grâce à champ magnétique. Et des chercheurs anglais ont créé un “camion-poubelles spatial” doté d’un harpon et d’un filet qui devrait être lancé cette année.
D’autres projets envisageaient aussi un “nettoyage laser” de l’espace. “Mais la plupart étaient basées sur des lasers terrestres […] ce qui limite leur application à cause du positionnement géographique et de la distance”, soulignent les chercheurs chinois dans leur étude. “La station orbitale a l’avantage d’être simple, facile à mettre en place, low cost, réutilisable et aussi capable de surveiller et de traquer des débris. C’est pourquoi elle est considérée comme l’approche la plus prometteuse et celle sur laquelle la plupart des recherches se focalisent”, ajoutent-ils.
Une guerre des étoiles?
Si les recherches sont théoriques, le problème, lui, est très concret. Les scientifiques redoutent particulièrement un phénomène appelé syndrome Kessler: une réaction en chaîne commençant par un premier incident -une explosion ou une collision-, qui provoquerait un nuage de débris, qui percuteraient d’autres satellites, etc. Un peu comme dans le film Gravity.
Si aucun désastre de ce type n’est encore arrivé, des problèmes ont déjà eu lieu. Des équipages de la Station spatiale internationale ont par exemple été forcés d’évacuer leurs quartiers d’habitation pour se réfugier à bord d’un module de sécurité à cause de débris spatiaux en 2011 -des débris passant à 250 mètres seulement- et en 2015 (un vieux satellite menaçait de s’empaler dans la Station). Si une telle collision se déroulait, un projet de plusieurs milliards d’euros serait non seulement détruit, mais l’impressionnante vague de débris provoquée pourrait endommager d’autres satellites, comme modélisé par le syndrome Kessler.
Les stations lasers spatiales apparaissent donc comme une excellente solution. Mais elles soulèvent néanmoins quelques questions et inquiétudes, note Futurism. Pourraient-elles être équipées de laser plus puissant, pouvant pousser de plus gros objets, comme des satellites obsolètes? Et si c’est le cas, comment s’assurer qu’elles ne soient pas transformées en armes spatiales, façon mini-étoiles de la mort? Qui donc, alors, serait chargé de les construire, ou de les contrôler? Après tout, la pollution spatiale concerne toutes les nations du monde.Des problèmes que les gouvernements et les différentes agences spatiales devront résoudre avant de pouvoir passer de la simulation informatique au projet concret. Problème: le temps presse, les déchets spatiaux devraient encore augmenter dans les années à venir, à mesure que des centaines de nouveaux satellites rejoignent l’orbite de la Terre.
L’Express