En plus de s’attaquer aux mécanismes de division cellulaire, cette molécule “inédite” pourrait permettre de “couper les vivres” aux tumeurs en les empêchant de créer leur propre réseau vasculaire.
ET-D5, c’est le nom de la molécule anti-cancer développée par la start-up grenobloise Ecrin-Therapeutics. Fondée en 2010 juste après le dépôt d’un brevet, la société est partie en décembre 2014 à la recherche d’un financement de 500.000 euros par le biais d’une plateforme de “crowdfunding” (financement participatif). L’objectif est de pouvoir engager des essais cliniques sur des humains à l’horizon 2016.
Jusqu’ici en effet, cette molécule qui s’attaque à la division cellulaire des tumeurs n’a été testée que chez des souris, “avec des résultats vraiment très bons” nous confie Aurélie Juhem, directrice scientifique d’Ecrins-Therapeutics. C’est à partir des travaux de cette chercheuse en biologie commencés dans le cadre de sa thèse qu’a émergée la molécule ET-D5. Des recherches menées en partenariat avec l’Institut Curie. En 2008, celle-ci tire son épingle du jeu au milieu de 6.000 autres molécules patiemment testées in vitro. L’originalité de la stratégie est de “s’attaquer à une protéine inédite” dite phosphatase. “Cette molécule bioactive s’attaque à la division cellulaire propre aux cellules cancéreuses sans toucher les tissus sains environnants. Elle s’attaque de plus au réseau vasculaire tissé par la tumeur”, explique la chercheuse.
Et c’est peut-être ce deuxième aspect de la thérapie qui est le plus remarquable : la capacité de la molécule ET-D5 à s’attaquer aux néo-vaisseaux qui irriguent la tumeur. En effet, au cours de son développement, la tumeur colonise peu à peu le système sanguin de l’hôte de façon à créer un réseau propre qui lui garantit des apports facilitant sa croissance (voir infographie ci-dessous). C’est également ce réseau vasculaire qui facilite la circulation de cellules cancéreuses à l’origine des métastases. S’attaquer à ces néo-vaisseaux serait ainsi une façon de “couper les vivres” à la tumeur, l’affamer pour mieux la combattre.
Les résultats des essais menés sur les souris l’ET-D5 n’ont cependant pas encore été publiés “pour des raisons de concurrences”, explique Aurélie Juhem. Il s’agit bien sûr de protéger le brevet déposé par la start-up en 2010 et qui appartient notamment à l’université Joseph-Fourier de Grenoble. Les tests ont été menés sur deux types de cancer : la thyroïde et le poumon “car ce sont deux cancers dont ont maîtrise bien les modèles animaux”.
Reste maintenant à recueillir les 500.000 euros nécessaires à la conduite de tests certifiant la non-toxicité de la molécule chez l’homme. La condition sine qua none à des essais humains ; lesquels pourraient alors être réalisés au centre de lutte contre le cancer Léon-Bérard de Lyon. “Nous espérons pouvoir lancer les premiers essais au premier trimestre 2016”, précise Aurélie Juhem.
Sciences et Avenir